En 2017, j'entreprends la retranscription du carnet de bord d'un soldat de la Seconde guerre mondiale. (Dont je garderai l'anonymat selon les souhaits de la famille).
B. retrace dans son carnet de bord toutes ses aventures, presque au jour le jour, de sa mobilisation en août 1939 jusqu'à son retour en France en juin 1945, en passant par cinq longues années de captivité dans une ferme allemande.
La tâche a été longue et parfois ardue, souvent passionnante et émouvante, et quand le travail s'est terminé, j'ai presque eu l'impression d'avoir connu cet homme qui racontait un quotidien vieux de quatre-vingts ans... car il s'agit bien d'un quotidien qui s'installe dans cette ferme, où B. n'est pas maltraité, mais où la vie s'écoule de manière monotone. Loin des clichés d'une guerre pleine de rebondissements, nous approchons au plus près du vécu ordinaire d'un humain parmi d'autres, dans un contexte pourtant extraordinaire.
J'ai pu croiser mon amour de l'écriture, de l'histoire et du dessin, car j'ai complété son récit par quelques illustrations.
Le carnet a ensuite été auto-édité en plusieurs exemplaires.
" 9 octobre 1942
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Quand je pense qu'il y a deux ans aujourd'hui, je recevais pour la première fois des nouvelles du pays, après 5 mois d'attente. Ce jour-là, j'oubliai que j'étais un Gefangen (prisonnier). Je pensais encore moins être toujours là deux ans après. Et ces deux ans sont arrivés, et la guerre continue toujours, elle prend même une tournure qui n'annonce pas la fin.
Ils nous endorment tout le temps avec leurs bobards. D'ailleurs, j'en crois rien du tout depuis longtemps. La Relève pour moi c'est peu de choses, il peut bien en venir des millions de volontaires avant que ce soit mon tour. Nous, les instruments de travail des petits Kommandos, c'est nous qui ferons partie des derniers rescapés. Nous travaillons trop bien pour qu'on nous renvoie.
Oui ! Je pense cela ce matin en gardant les vaches, car aujourd'hui il pleut et ne fait pas chaud, alors c'est moi qui hérite de cette planque.
Il me semble quand même que nous devons commencer à descendre l'échelle, je souhaite que cela soit vrai.
Nous sommes Vendredi aujourd'hui, je suis content à la pensée que ce soir peut-être j'aurai des nouvelles du pays. C'est toujours ce qui passe en premier, peu importe le reste."